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Les risques rocheux, une réalité de longue date face à de nouveaux défis

La montagne a toujours été un territoire spectaculaire et vulnérable. Espaces de nature et de liberté, les massifs sont aussi marqués par des dynamiques naturelles puissantes : aléas rocheux, glissements, chutes de blocs, séismes, crues torrentielles. Depuis toujours, l’être humain doit composer avec ces phénomènes, mais leur compréhension et leur maîtrise deviennent aujourd’hui un enjeu essentiel. C’est dans ce contexte que s’inscrit le laboratoire Risque Rocheux et Ouvrages géotechniques (RRO) de l’Université Gustave Eiffel, acteur scientifique majeur dans l’étude, l’expérimentation et la prévention de ces phénomènes.

La création du laboratoire RRO, une expertise née du terrain 

Le laboratoire RRO voit le jour en 2012, lors de la création de l’IFSTTAR, issu de la fusion du LCPC et de l’INRETS. Son implantation à Lyon répond à une logique simple : la majorité des phénomènes naturels étudiés – chutes de blocs, instabilités rocheuses, risques gravitaires – se situent en région Rhône-Alpes. Cette proximité avec le terrain permet au laboratoire d’assurer une double mission : produire des connaissances scientifiques et répondre aux besoins des acteurs publics et privés en matière d’évaluation, de diagnostic et de protection des sites.

L’origine du laboratoire est étroitement liée au développement, en 2009, d’une station d’essais de chute de blocs près de Chambéry. Ce site, situé au cœur du massif de la Chartreuse, constitue l’une des plateformes d’expérimentation les plus performantes d’Europe. Sa falaise verticale de 80 mètres, équipée d’une flèche de grue permettant de lâcher des charges jusqu’à 20 tonnes, offre des conditions uniques pour tester des équipements grandeur nature. Grâce à un système de balancier innovant, la station peut aussi simuler des impacts horizontaux, ouvrant la voie à une grande variété d’essais sur les dispositifs de protection.
Cette plateforme rare illustre parfaitement la vocation du RRO : étudier les risques rocheux en conditions réelles, avec une approche fortement ancrée dans l’expérimentation.

Un laboratoire en évolution : comprendre les risques rocheux à l’ère du changement climatique

Depuis sa création, le laboratoire RRO a vu ses thématiques changer notamment sous l’effet du changement climatique. Les phénomènes rocheux ont évolué : variations thermiques plus fortes, dégel du permafrost, sécheresses puis pluies extrêmes, affaiblissement des structures naturelles, … tous ces facteurs modifient profondément les dynamiques de chute de blocs, les risques sismiques ou hydrauliques, et les conditions de stabilité des ouvrages.

Les travaux menés au laboratoire s’inscrivent dans ces nouveaux questionnements. Les territoires de montagne sont historiquement exposés à de multiples risques, mais le réchauffement bouleverse les mécanismes, entraînant la nécessité de repenser la prévision, la protection et la surveillance. 
Le laboratoire RRO contribue notamment à ces efforts à travers trois axes, la protection contre les risques naturels gravitaires, le comportement des ouvrages géotechniques et l’auscultation et le diagnostic des sites naturels.

C’est dans ce contexte que le regard d’Eric Gaume, directeur du campus de Nantes et directeur adjoint du département GERS, éclaire plus largement l’action de l’Université Gustave Eiffel sur ces enjeux climatiques, notamment sur l’étude des phénomènes, la prévision des risques, la conception d’ouvrages de protection ou encore les dispositifs de surveillance.

Pour relever ces défis, le laboratoire travaille en réseau avec d’autres équipes et laboratoires de l’Université Gustave Eiffel, comme ceux impliqués dans l’étude des phénomènes climatiques, la conception d’ouvrages ou la modélisation des risques. Cette approche collaborative permet de croiser disciplines, échelles d’analyse et méthodes d’observation, dans un contexte où les interactions entre sol, roche, climat et infrastructures deviennent de plus en plus complexes.

Comprendre l’impact du changement climatique sur les ouvrages grâce à Hicham Cherifi, ingénieur en génie civil à l’Université Gustave Eiffel

Au cœur de ces évolutions scientifiques se trouvent également les travaux des doctorants du laboratoire. Parmi eux, Hicham Cherifi consacre sa thèse à un enjeu encore peu exploré mais crucial : la vulnérabilité des ouvrages de maçonnerie, en particulier les murs de soutènement maçonnés, face au changement climatique.

Ses recherches s’inscrivent dans le cadre du projet national DOLMEN, qui vise à améliorer la compréhension des mécanismes d’altération et de fragilisation des structures anciennes. Ces ouvrages, souvent centenaires, constituent une part importante du patrimoine routier et ferroviaire français. Ils sont aujourd’hui soumis à de nouvelles contraintes : cycles gel/dégel renforcés, épisodes de chaleur extrême, humidification puis dessiccations rapides. Tous ces phénomènes sont susceptibles d’affaiblir les matériaux et les assemblages.
L’objectif de la thèse est double, identifier les effets du réchauffement climatique sur le comportement mécanique de ces ouvrages et proposer des solutions pour les protéger, les renforcer ou adapter leur surveillance.
Ces travaux, pleinement intégrés aux dynamiques du laboratoire, illustrent la manière dont le RRO articule recherche fondamentale, expertise appliquée et appui aux politiques publiques.

Dans un contexte où la montagne se transforme et les risques naturels évoluent sous l’effet du changement climatique, le laboratoire RRO se place comme un acteur scientifique et opérationnel essentiel. En combinant des plateformes d’essais uniques, une forte expertise en génie géotechnique et un engagement dans les grands enjeux climatiques, il contribue à mieux comprendre, anticiper et maîtriser les risques rocheux. Qu’il s’agisse d’expérimentation grandeur nature ou de recherches doctorales innovantes, le laboratoire RRO participe à construire des territoires plus sûrs et plus résilients face aux défis de demain.


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Publié le 20 novembre 2025