Architecture et urgence environnementale : entretien avec Paul Landauer, directeur de l'OCS

Présentez-vous en quelques mots.

Paul Landauer : Je suis architecte, docteur et habilité à diriger les recherches. Je suis professeur à l’École d’architecture de la ville et des territoires Paris-Est. J’y dirige la filière de master « Transformation » et, pour quelques semaines encore, l’OCS. Mes recherches portent actuellement sur les conséquences de l’urgence environnementale sur le projet architectural. Je m’intéresse plus particulièrement aux impacts du réemploi des sols et des bâtiments existants.

Pouvez-vous nous parler des recherches menées au sein de l’Observatoire de la Condition Suburbaine ?

P. L. : Les recherches menées au sein de l’OCS se trouvent au croisement de trois questionnements, axés pour l’essentiel, sur les évolutions contemporaines de l’architecture : l’approfondissement de la notion de territoire (une notion essentielle sur laquelle s’est fondée le programme originel de notre école d’architecture, à la fin des années 1990) ; les conséquences des transitions énergétiques et environnementales sur le projet architectural ; enfin l’histoire, la théorie de l’architecture et la pensée du projet.

Ces questionnements croisés s’inscrivent par ailleurs dans le projet scientifique de l’UMR AUSser, une unité mixte du ministère de la Culture et du CNRS, qui regroupe également trois autres unités de recherche d’écoles d’architecture franciliennes. Ce projet scientifique comprend trois axes : patrimoine et tourisme ; territoires et paysages en transition(s) ; cultures, savoirs et médiations culturelles.

Qu’est-ce qui a amené à la création de cette équipe de recherche ?

P. L. : L’OCS a été créé en même temps que l’École d’architecture de la ville et des territoires, alors la dernière venue dans le paysage des écoles d'architecture françaises. Ses recherches étaient en phase avec le nouveau projet pédagogique, lequel proposait d’exposer l’enseignement de l’architecture aux formes diverses qu’avaient prises les villes et les territoires contemporains en Europe. Les premières recherches de l’OCS ont ainsi porté sur l’observation et l’interprétation des territoires suburbains, et plus particulièrement celui de la ville nouvelle de Marne-la-Vallée, où l’école se trouvait.

Si les thèmes de l’OCS ont largement évolué depuis, notre souci d’investir les préoccupations qui motivent l’enseignement, lui, est resté. Ainsi, la plupart de nos recherches sont issues de nos investigations sur la pédagogie ; en retour ces mêmes recherches continuent d’alimenter nos cours, nos séminaires et nos ateliers de projet, en particulier dans les quatre filières de master et les deux formations post-master de notre école : le DSA architecte-urbaniste et le DPEA architecture post-carbone.

Par ailleurs, dès ses débuts, l’OCS a accordé une place importante à l’activité d’édition. Depuis 2010, nous éditions la revue Marnes, documents d’architecture, une revue qui a acquis une vraie reconnaissance dans le monde académique de l’architecture.

Comment les enjeux de l’OCS s’inscrivent-ils dans les thématiques portées par l’Université Gustave Eiffel ?

P. L. : Depuis quelques années, les recherches de l’OCS ont pris à bras les corps les grands enjeux environnementaux. Cette approche ne contredit pas notre intérêt pour l’histoire et les théorie de l’architecture. Bien au contraire : nous nous attachons à explorer les idées et les formes du passé comme autant de jurisprudences pouvant nous aider à faire face, aujourd’hui, à ces enjeux.

Nous pensons que cette exploration disciplinaire est justement ce qui nous permet d’envisager des liens étroits avec d’autres laboratoires davantage orientés sur les sciences humaines et sociales ou les sciences de l’ingénieur. À condition, bien sûr, de ne pas limiter l’architecture à la seule conception des bâtiments. Or, nous partageons, au sein de l’OCS, une vision élargie de l’architecture qui comprend tous les domaines où intervient une forme de designdans l’espace, qu’il s’agisse d’urbanisme, de paysage ou de conception des infrastructures et des sols ou de dispositifs bâtimentaires.

Comment l’OCS traite-t-il la question de la transition écologique au sein de ses recherches ?

P. L. : Depuis quelques années, les chercheurs de l’OCS aussi bien que nos doctorants déploient une palette large de travaux abordant l’écologie sous différents aspects. Ceux-ci vont de l’étude des liens qu’entretiennent l’architecture et l’agriculture aux incidences du réemploi dans la conception architecturale, en passant, par exemple, par l’histoire de l’architecture solaire, l’analyse des démarches de revitalisation dans les territoires en déshérence, l’exploration historique et prospective des architectures du stock ou de la transposition du paradigme de la réparation dans le champ de l’architecture. Certains de ces travaux seront d’ailleurs présentés à l’École d’architecture de la ville et des territoires le samedi 15 octobre à partir de 14 heures dans le cadre des Journées nationales de l’architecture.